" C’est avec une grande tristesse dans le cœur que je dois vous annoncer la mort de Mlle Honorine RASOAMANALNA, la vice-présidente d’Akamasoa. Elle a été retrouvée morte ce dimanche matin, à 6 heures, dans un canal, à quelques mètres de sa maison. Plusieurs blessures à la tête montrent qu’elle a été tuée d’une façon horrible, et son corps est actuellement à l’hôpital pour une autopsie. Nous restons consternés devant cet acte horrible et odieux.
Je veux rendre témoignage à Mlle Honorine RASOAMANALNA qui a travaillé avec nous à Akamasoa pendant 24 ans, manifestant dès le début un grand amour pour l’accueil et le soin des pauvres. À l’accueil des familles de la rue à Mangarivotra, c’est justement là qu’elle a débuté. Là, j’ai vu combien elle était sensible à la douleur des autres. Ce qui a fait qu’après quelques années, on l’a appelée pour rejoindre le bureau Akamasoa, c’est-à-dire le groupe restreint des personnes qui ont tout donné pour servir leur prochain. Ainsi elle est devenue une personne d’une grande confiance. Elle a reçu la mission de gérer tous les travaux d’Akamasoa à l’intérieur de Madagascar : dans la région de Fianarantsoa, Safata, d’une part, où elle a été responsable de la construction d’une trentaine d’écoles publiques. Dans la région du sud est, ensuite, Vangaindrano, Matanga, Ampitafa, où après le cyclone Geralda elle allait animer et surveiller le travail d’Akamasoa pour encore une fois construire une vingtaine d’écoles publiques abîmées par le cyclone.
Elle a aussi longuement travaillé avec les paysans, et fait beaucoup pour le développement de la campagne et le reboisement. Cette campagne qu’elle aimait, avec toutes ces fleurs qu’elle aimait aussi, qu’elle ramassait, dont elle cherchait les semences pour ensuite les replanter, chez elle, dans sa maison, ou bien dans les villages d’Akamasoa, révélant par là une réelle âme pour la beauté.
Au caractère, c’était une personne d’un courage exceptionnel, d’une authenticité et d’une limpidité d’âme très grandes. Ce qu’elle croyait, elle le faisait. Jamais elle n’a parlé de choses dont elle n’était pas convaincue, mais au contraire, elle s’élevait pour défendre sa foi et ses convictions, n’hésitant jamais à dire la vérité, dénonçant tout ce qu’elle voyait autour d’elle d’injuste ou de malhonnête. À plusieurs reprises elle a montré ce courage devant les représentants de l’ordre, gendarmerie et mairie, les questionnant, les appelant à être plus honnête dans leur travail et à aider vraiment les paysans malagasy à se mettre debout. Depuis deux ans elle avait attrapé la fièvre typhoïde, une maladie qui lui a fait beaucoup de mal. Mais avec son courage et sa rage d’aider son peuple, elle a pu vaincre cette maladie. À peine guérie, elle était déjà revenue prendre part à notre travail.
Mlle Honorine était une héroïne de son pays, méconnue des médias et des instances officielles, mais travaillant avec beaucoup d’abnégation et de sacrifice pour son peuple. Ce qui nous fait mal au cœur, c’est qu’elle est tombée comme un cèdre face à la méchanceté des hommes, car sa vie a été arrêtée par un meurtre perpétré froidement par des malfaiteurs encore inconnus, à quelques mètres seulement de la maison où elle vivait. Le matin même, elle avait assisté à l’Assemblée Générale d’Akamasoa, se voyant réélire vice-présidente à force de hourras et de mains levées. Ce qui démontre une fois de plus qu’elle était très appréciée par tous ses compagnons de travail et de lutte. C’est pour cela que notre peine est grande aujourd’hui, d’autant plus que sa mort est arrivée d’une façon aussi imprévue que brutale. Elle qui aimait tellement son pays, ses compatriotes, la vérité et la justice, elle est morte à l’image de tous les combattants qui donnent leur vie pour l’amour de leur patrie et de leur peuple. ", raconte avec tristesse le père Pedro.